Promenade avec Julien Leuenberger en son royaume du Jardin botanique

Des chants d’oiseaux et des coassements s’harmonisent avec des voix d’enfants et le bruit de pas sur les chemins caillouteux. Des touches colorées et le blanc des pâquerettes ponctuent les multitudes de nuances vertes du paysage. Aux abords des allées, des petites bêtes fourmillent dans les buissons. Les eaux calmes sont de temps à autre ponctuées de cercles qui grandissent, se suivent et disparaissent à l’arrivée de canards. Nous sommes à Lausanne, dans le quartier sous-gare, au cœur du Jardin Botanique niché entre le Parc de Milan et la colline de Montriond. C’est dans ce contexte de quiétude que travaille Julien Leuenberger depuis sept ans. Un environnement où il considère qu’il est «très facile de rendre la science vivante».

«Tout autour de nous, il y a la vie qui est là», sourit le médiateur culturel. Et quel sourire, révélant son enthousiasme exceptionnel à «mélanger la nature, la science et la culture». Lui qui avait hésité à devenir éducateur de la petite enfance se réjouit d’avoir choisi les études en biologie. Il considère son métier comme l’alliance du social et du scientifique: comprendre et expliquer le monde du vivant, et transmettre ce savoir en le présentant au plus grand nombre. D’ailleurs, l’aspect social est ce que Julien Leuenberger préfère. Il évoque une activité animée le matin-même pour des enfants de 4 et 5 ans. Son émerveillement est palpable à la mention de ce moment.

Le regard de Julien Leuenberger s’illumine à nouveau lorsqu’il est question de son arbre favori, le chêne vert, qui tient son nom de la couleur qu’il conserve tout au long de l’année, ne perdant pas ses feuilles en automne. La taille de ce végétal est impressionnante et l’air où est son ombre, frais. Son âge, environ 90 ans, comme les autres arbres du jardin.

Des passantes saluent le médiateur culturel, qui les salue en retour. D’elles, ainsi que de toutes les personnes visitant le Jardin botanique de Lausanne, voici ce qu’il en dit: «Je pense que les personnes se nourrissent de ce lieu. Cela nous apporte tellement d’être au pied d’un arbre. C’est une connexion à la nature et un retour à quelque chose d’un peu plus simple. Nous sommes dans un lieu qui oblige à faire des pauses. Pour le public en général, il est possible de s’imprégner de cet espace. Non pas de venir ici en tant que scientifique pour avoir uniquement des connaissances sur les plantes. Les visiteurs veulent prendre du temps vers la cascade, sous un arbre et se poser pour échanger. Ils voient aussi le jardin botanique comme un tiers-lieu, des environnements et des ambiances». Cependant, il reste conscient que la mission de la médiation culturelle dans ce «musée en plein air» est principalement de donner des connaissances sur les plantes.

C’est lors de la création de la grainothèque de la Bibliothèque Montriond de Lausanne qu’une belle collaboration s’est initiée avec le Jardin botanique voisin. Isabelle Cardis, responsable de la bibliothèque, cherchait alors une personne pour donner une conférence sur les graines de variétés anciennes de plantes et leur conservation. Depuis, Julien Leuenberger et Isabelle Cardis ont depuis joint leurs forces à diverses reprises et permettent régulièrement au public de se familiariser avec les notions de durabilité et de biodiversité à la bibliothèque. Le médiateur culturel s’en réjouit: «J’adore cette collaboration! Nous avons des compétences différentes et chacun notre public. En faisant des choses ensemble, nous touchons plus de monde sur des notions tellement importantes.»

Des pétillements s’invitent à la promenade. Julien Leuenberger explique que c’est l’arbre à proximité qui craque, en plus de ses aiguilles et ses pommes de pin qui s’ouvrent. «Les arbres ne nous parlent pas avec des mots, mais nous pouvons quand même les écouter.» Il se remet à marcher, le regard attiré par une plante alpine en fleur. Son regard se promène ainsi dans les livres: «Je finis rarement mes lectures. Je picore ce qui m’intéresse. C’est une déformation professionnelle : ce qui m’anime, c’est d’apprendre des choses en lisant.» Les genres qu’il consomme sont les romans de voyage, les essais et les biographies. Sa définition de la littérature: «La science de l’émerveillement et du voyage immobile». En cela, il se permet le parallèle suivant: «Un des pouvoirs du jardin botanique, c’est de voyager en restant au cœur de Lausanne. Ici, nous sommes amenés dans un monde incroyable. C’est comme une bulle verte au milieu de la ville. Une sorte de parenthèse qui n’existe pas à l’état sauvage». En effet, des plantes de tous horizons cohabitent dans ce jardin, créant un lieu inédit. Un univers dans lequel Julien Leuenberger s’épanouit de jour en jour.