Palais de Beaulieu
Dédale historique

La façade imposante et monumentale de l’entrée du Palais de Beaulieu
En bref
Adresse: Bergières 10 (avenue des)
Affectation: Bâtiment administratif et de café-restaurant
Style: Palimpseste
Architectes: Charles Braun, Marcel Maillard, Charles et Charles-François Thévenaz, Lausanne, Richter & Dahl Rocha, Lausanne, et Claude Fehlmann, Morges
Ingénieurs: Henri Muret (Halle centrale 1920), Lausanne, Maurice Cosandey (Halle nord 1950), Lausanne, et Nicolas Fehlmann (rénovation théâtre, transformation halle sud, transformation halle centrale), Morges
Réalisation: 1920-2022
Recensement architectural: note 2 - objet d'intérêt régional
Ce qu’il faut savoir
L’entrée monumentale du Palais de Beaulieu comporte un corps central et deux longues ailes avec de hautes baies vitrées. Ce portique néoclassique a été construit en 1939. Il abritait un vestibule-salle des pas-perdus, un restaurant au premier étage et une grande salle de conférences au deuxième étage. L’intérieur a été reconstruit et modernisé en 2003 par le bureau Fehlmann. L’entrée comporte aujourd’hui plusieurs salles polyvalentes et est le cœur de distribution du Palais.
Derrière elle se cachent principalement trois halles ainsi qu’une multitude d’interventions allant de 1920 à 2022. Avec les transformations successives, le Palais est devenu un véritable labyrinthe où se rencontrent des architectures de divers styles.
La première halle permanente a été construite en 1920 par l’architecte Charles Braun avec 2’000 m2 au rez-de-chaussée et 1’000 m2 au sous-sol. Cette halle est toujours debout et se situe derrière l’entrée principale. Sa construction était envisagée en bois, mais pour des raisons de sécurité, de danger incendie, d’entretien et de pérennité, elle a été construite en béton. Sa structure est formée de 8 arches en béton armé d’une portée de 35 m pour une hauteur de 15 m. Afin de satisfaire le délai de livraison – la halle est mise à l’enquête en avril 1920 et la manifestation du Comptoir suisse s’est tenue en septembre de la même année – c’est un béton à prise accélérée avec du ciment Portland qui avait été utilisé. Sa toiture est partiellement vitrée pour éclairer naturellement l’espace d’exposition. Des halles temporaires complétaient la surface disponible jusqu’à près de 6'000 m2. Cette halle primitive a été par la suite agrandie de six arches supplémentaires et a subi de nombreuses modifications au cours des ans. Sa dernière transformation date de 2018 par le bureau Richter & Dahl Rocha qui a rénové complètement la halle et y a ajouté un niveau intermédiaire. Une partie de la halle centrale est occupée aujourd’hui par une école d’infirmiers et d’infirmières.
L’édification en 1920 d’une halle pérenne répondait à la nécessité d’avoir un bâtiment confortable pour la Foire de Lausanne qui exposait des «échantillons» en lien avec l’alimentation (machines, emballages, conservation, etc.) et l’agriculture (élevages, cultures, machines, produits, etc.) d’origine suisse. Elle permettait également d’accueillir des manifestations toute l’année: marchés, expositions agricoles, concerts, expositions artistiques, cantines, congrès. Cette halle abrita même des courts de tennis et des installations pour d’autres sports, mais aussi des concours artistiques et d’architecture par exemple.
Au fur et à mesure des éditions du Comptoir, d’autres domaines ont été exposés. Dès 1922, l’exposition de matériaux de construction et de constructions rurales a été renforcée. A même été organisé un concours d’architecture portant sur des «plans de constructions rurales» pour une ferme d’un domaine de 10 hectares et une habitation ouvrière agricole.
En 1930, une deuxième halle, proche de l’avenue des Bergières, est envisagée par Charles Braun, architecte du Comptoir. En 1932, elle est construite pour un coût d’un millions de francs suisses de l’époque (soit environ 7,9 millions en 2023). Elle dépassait l’avant de la halle centrale de 1920 avec une architecture faite de hautes baies vitrées et d’une corniche à bandeaux. La différence d’alignement a été comblée par la construction de la nouvelle entrée en 1939. Cette halle était prévue comme halle de dégustation avec un restaurant et une salle des fêtes avant que le théâtre n’y soit construit.
Cette grande halle a été complètement transformée en 2022 après l’organisation par le Tribunal Arbitral du Sport de mandats d’étude parallèles en 2016: le bureau Richter & Dahl Rocha en fut lauréat. La halle fût complètement évidée, à l’exception du théâtre, et seules les façades furent conservées. Tout l’intérieur a été refait pour correspondre à la nouvelle utilisation du bâtiment. Plusieurs étages y ont été construits et d’autres en attiques ont été ajoutés. Il y a encore un restaurant au rez-de-chaussée, bien que celui-ci soit neuf, ainsi qu’une salle de banquet.
C’est dans cette halle qu’a été construit en 1954 par Marcel Maillard un immense théâtre, le plus grand de Suisse encore actuellement avec plus de 1600 places. Le théâtre est proche «du plan classique français» selon l’architecte. La salle est faite d’une ossature métallique. Le balcon en demi-cercle construit en béton armé s’avance sur les côtés avec un porte-à-faux moyen de 5,50 m. Les places sont installées en hémicycle. Un grand lustre éclaire la salle. Le bureau Fehlmann a complétement rénové le théâtre de 2019 à 2022 en conservant son identité tout en améliorant la relation entre les spectacles et l’audience: scène aplanie et abaissée et inclinaison du parterre augmentée. Les circulations ont également été améliorées et simplifiées. La toiture a été refaite.
Une troisième halle a été construite du côté du bois de Beaulieu par Charles et Charles-François Thévenaz en 1950 après la démolition des écuries et halles d’exposition du bétail qui avaient été construites en bois. Comme pour la halle de 1920, le délai de livraison était court: neuf mois. Elle a alors été érigée avec une ossature métallique préfabriquée. Pendant son usinage en atelier, les travaux de démolition, de terrassement et de fondation avaient pu être exécutés. L’entraxe des fermes métalliques est le même que pour celles en béton de la halle centrale, soit 7 m, afin d’assurer une continuité spatiale. Cette grande halle mesure 44 m par 98 m. Sa toiture est formée d’arcs croisés. Certains caissons entre les arcs sont vitrés et au-dessus de la toiture un lanterneau de métal et de verre permet l’éclairage zénithal de la halle. C’est la partie la moins transformée du complexe. Son espace polyvalent peut encore et toujours accueillir différents événements: expositions, spectacles, conférences, fêtes, sports, etc. Entre cette nouvelle halle et celle de 1920, une galerie de liaison large de 12 m a été construite.
Le complexe de Beaulieu formé de la halle centrale, des halles latérales, y compris le théâtre, et de l’entrée monumentale est devenu formellement en 1957 le Palais de Beaulieu. Le fronton arborait jusqu’à récemment cette dénomination en lieu et place de Comptoir suisse, nom de l’institution présente dès 1920 à Lausanne. Plus précisément, il s’agissait alors du Comptoir suisse des industries alimentaires et agricoles qui pérennisait la Foire de Lausanne, foire commerciale permettant aux industriels et fabricants d’exposer leur savoir-faire afin de promouvoir les produits helvétiques et stimuler l’économie. L’idée de cette foire était née au début du XXe siècle. Elle avait pris place sur un grand champ d’herbes préservé de l’urbanisation – la place de Beaulieu – s’étendant au nord du Château et du Collège de Beaulieu et utilisé encore à la fin du XIXe siècle comme place d’armes. Au début du XXe siècle, avant l’installation du Comptoir, cette place était devenue un champ de foire et accueillait des manifestations comme la Fête fédérale de gymnastique ou l’Exposition nationale d’agriculture. Les constructions nécessaires n’étaient alors que temporaires.
Curiosité
Le Comptoir suisse s’est tenu dans le Palais de Beaulieu et les halles nord et sud jusqu’à sa disparition en 2018, faute de fréquentation. En 1920 il y avait près de 500 exposants, en 1965 il y en aura jusqu’à près de 2400, mais seulement 450 en 2018. De 150'000 visiteurs et visiteuses en 1920, il y en eu jusqu’à 1,1 millions en 1986. Avec encore un demi-million de visites au milieu des années 1990, la fréquentation baissa pendant les dernières années jusqu’à finir à 61'000 personnes en 2018.