Sous le nom «Eben-Hézer», soit en hébreu «la pierre du secours», la Lausannoise Julie Hofmann ouvre en 1899 un «petit asile d’enfants incurables». Elle loue pour cela un appartement rue du Valentin, y hébergeant 2 enfants souffrant de maladie chronique qu’elle a fait venir de Paris. C’est le début d’une grande aventure au service des enfants en situation de handicap mais aussi, plus tard, des personnes en fin de vie.
La modeste initiative du début ne va cesser de prendre de l’importance, se diversifier et se professionnaliser, malgré la méfiance et le rejet rencontrés durant de longues années de la part de la population comme des autorités. On lui demande ainsi, lorsqu’elle s’installe dans le quartier de Chailly, de poser une clôture pour masquer aux passantes et aux passants la vue des personnes handicapées…
Elle investit la Villa romaine de Pully, puis développe ses activités dans diverses maisons du chemin de Rovéréaz à Lausanne. Les équipes soignantes, en majorité des femmes peu formées, sont réduites et souvent peu payées. Elles vivent sur place pour créer un esprit familial et communautaire, repas et activités se font en commun.
À l’âge de 80 ans, elle quitte sa fonction de directrice générale tout en orchestrant la recherche de fonds pour acquérir l’Hôtel du Roc à Saint- Légier, futur Home Salem. Docteur honoris causa de l’Université de Lausanne à 70 ans, elle reçoit la médaille Florence Nightingale de la Croix-Rouge 8 ans plus tard, et à 90 ans, elle est la première personne à obtenir la citoyenneté d’honneur du canton de Vaud.
Quel destin pour cette fillette née avec une myopie forte (elle ne voit qu’à 10%) qui l’empêche d’intégrer la communauté des Diaconesses de Saint-Loup – elle se fait d’ailleurs appeler toute sa vie «sœur» et porte un costume copié sur celui des Diaconesses. Enfant déjà, mystique, élevée par des parents membres de l’Église libre, elle visite des enfants malades et économise pour créer Eben-Hézer. Après un diplôme d’infirmière de La Source à 32 ans, elle travaille à l’Hospice de l’enfance et à l’Hospice orthopédique.
Membre de l’Armée du Salut, Julie Hofman s’inspire de ses méthodes d’évangélisation, accrochant des banderoles couvertes de passages bibliques aux palissades et brodant «Allez Jésus» sur son panier à commissions.
Anonyme, Vue d’enfants paralysés et du personnel soignant dans l’asile Eben-Hézer à Chailly-sur-Lausanne, carte postale, entre 1923 et 1940, coll. Musée Historique Lausanne, tous droits réservés.
Pour aller plus loin
Illustration de Julie Hofmann par Hélène Becquelin tirée du livre «100 femmes qui ont fait Lausanne»
Parc Julie-Hofmann
Le parc Julie-Hofmann - le parc à l’angle de l’av. Jean-Daniel-Abram-Davel et de la rue du Valentin - fait partie des lieux que la Municipalité a décidé de nommer ou de renommer pour donner plus de visibilité aux femmes dans l’espace public.
Ce nouveau nom est entré en vigueur le 1er octobre 2023.
Pour en savoir plus sur le projet: «Plus de place(s) aux femmes en Ville de Lausanne»