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Licenciement collectif (art. 335d à k CO; art. 43 LEmp)

Critères, définition et principe

Par licenciement collectif, on entend les congés donnés dans une entreprise par l’employeur dans un délai de 30 jours pour des motifs non inhérents à la personne du travailleur et dont le nombre est au mois:

  • égal à 10 personnes, dans les établissements qui occupent habituellement plus de 20 et moins de 100 collaborateurs ou
  • de 10% de l’effectif, s’agissant des établissements de 100 et moins de 300 collaborateurs ou
  • égal à 30 personnes, dans les établissements occupant habituellement au moins 300 personnes.

Le Tribunal fédéral (ATF 4A_531/2021) a eu l’occasion de rappeler que l’unité déterminante pour établir si les seuils prévus à l’article 335d CO sont atteints est celle de «l’établissement» et non «l’entreprise». Selon la doctrine, un établissement est une structure organisée, dotée en personnel, en moyens matériels et immatériels qui permettent d’accomplir les objectifs de travail. Lorsqu’un employeur possède plusieurs établissements faisant partie de la même entreprise, l’existence d’un éventuel licenciement collectif se détermine dans chaque établissement et non pas au niveau de l’entreprise. Le fait que les établissements soient proches d’un point de vue géographique n’est pas déterminant et les licenciements prononcés doivent être comptabilisés séparément.

A noter que les dispositions relatives au licenciement en temps inopportun (protection contre les congés, art. 336c CO), au licenciement immédiat (art. 337 CO), ainsi qu’au licenciement abusif (art. 336 CO) sont applicables dans tous les cas.

Le délai de 30 jours se calcule à compter du jour où la résiliation est prononcée et tient compte des résiliations effectuées dans une période de 30 jours avant et après la date de l’annonce du licenciement collectif. Les résiliations successives qui n’atteignent pas les seuils légaux mentionnés ci-dessus dans ce délai échappent à la procédure de licenciement collectif.

Exemple. Une entreprise de 200 travailleurs licencie 17 collaborateurs le 1er mai, 2 collaborateurs le 23 mai et 19 collaborateurs le 17 juin. Il y aura licenciement collectif, car il se sera trouvé une période de 30 jours entre le 23 mai et le 22 juin durant laquelle 21 travailleurs auront été congédiés, soit plus de 10% d’entre eux.

L’échelonnement des licenciements dans le temps est possible mais seulement s’il est effectué dans le but de faciliter la réinsertion des travailleurs sur le marché du travail ou s’il est justifié par l’organisation de l’entreprise. Dans le cas contraire, l’employeur commet un abus de droit et les différentes vagues de licenciements risquent d’être comptabilisées comme étant une seule.

En ce qui concerne les contrats de durée déterminée (CDD), il faut envisager l’hypothèse d’une résiliation anticipée du contrat dans le cadre du licenciement collectif. Conformément à l’article 335e al. 1 CO, l’on doit compter le licenciement qui anticipe la fin convenue du CDD dans le nombre de congés donnés par l’employeur pour déterminer s’il y a licenciement collectif au sens de l’article 335d CO. Il faut cependant garder à l’esprit qu’un licenciement notifié avant le terme convenu, motivé par des difficultés financières ou par la fermeture de l’entreprise, ne constitue jamais un juste motif de résiliation anticipée du contrat de travail déterminé. C’est à l’employeur d’assumer le risque lié à la conclusion d’un tel contrat. A ce titre, le travailleur concerné pourra toujours faire valoir des prétentions en justice pour non respect des clauses du CDD.

Les emplois concernés doivent avoir une existence de 6 mois au moins (dixit prof. G. Aubert; traduction du terme «habituellement» mentionné à l’article 335d al. 1 ch. 1 CO; cf. R. Wyler, Droit du travail, p. 469, 2e éd. Stampfli). A noter ici qu’il faut comptabiliser la durée d’existence du poste de travail en tant que tel et non les mois de service du travailleur occupant le poste.

Les dispositions relatives au licenciement collectif ne s'appliquent pas en cas:

  • de cessation d'activité de l'entreprise intervenue sur ordre du juge
  • de licenciement collectif suite à une faillite
  • de concordat par abandon d'actifs.

Procédure

L’entreprise qui procède à un licenciement collectif est tenue de respecter la procédure légale suivante:

  • consultation des travailleurs (ou de leur représentation) pour offrir la possibilité de formuler des propositions en vue d’éviter les licenciements, d’en limiter le nombre ou d’en atténuer les conséquences
  • annonce par écrit aux travailleurs (ou à leur représentation) des motifs du licenciement collectif, le nombre de travailleurs concernés, le nombre des travailleurs habituellement employés et la période pendant laquelle il est envisagé de donner les congés
  • notification de la copie de la communication susmentionnée et du projet de licenciement collectif à la Direction générale de l’emploi et du marché du travail (DGEM), rue Caroline 11, 1014 Lausanne, avec les indications utiles et les résultats de la consultation des travailleurs (art. 43 LEmp).

Sur demande, la DGEM anime, au sein de l’entreprise, une séance d’information présentant aux personnes licenciées le système d’assurance-chômage.

Lorsque le contrat de travail est résilié dans le cadre d'un licenciement collectif, les rapports de travail prennent fin 30 jours après la notification du projet de licenciement collectif à la Direction générale de l’emploi et du marché du travail, à moins que, selon les dispositions contractuelles ou légales, le congé ne produise effet à un terme ultérieur (art. 335g al. 4 CO).

Il en découle qu’un licenciement collectif ne peut jamais avoir pour effet de raccourcir les délais de congés contractuels ou légaux et qu’il ne peut pas non plus priver un travailleur de la protection contre la résiliation en temps inopportun (maladie, accident, obligation légale, maternité, etc), prévue à l’article 336c CO.

Cela implique par exemple que lorsqu’un licenciement collectif est notifié durant le temps d’essai, le délai de congé (en principe de 7 jours) prévu à l’article 335b al. 1 CO est porté à 30 jours.

Il en va de même en ce qui concerne la résiliation anticipée d’un contrat de durée déterminée: celle-ci ne déploie ses effets que 30 jours après la notification du projet de licenciement collectif à la Direction générale de l’emploi et du marché du travail, en vertu de l’article 335g al. 4 CO.

Consultation des travailleurs

L’employeur doit débuter la procédure de consultation du moment où il envisage un licenciement collectif. Il est tenu de se déterminer sur les propositions des travailleurs mais il reste libre dans le choix de ses décisions.

La procédure de consultation dure entre 10 jours minimum et 20 jours. Passé ce délai, l’employeur doit communiquer sa décision portant sur le maintient du licenciement collectif et, le cas échéant, sur le nombre de licenciements et la teneur du plan social.

Plan social (art. 335h à 335j CO)

Le plan social est une convention par laquelle l'employeur et les travailleurs fixent les moyens d'éviter les licenciements, d'en limiter le nombre ou d'en atténuer les conséquences.

L'employeur est tenu de mener des négociations avec les travailleurs en vue d'établir un plan social lorsqu'il remplit les critères suivants:

  • il emploie habituellement au moins 250 travailleurs
  • il entend résilier le contrat d'au moins 30 travailleurs dans un délai de 30 jours pour des motifs de gestion non inhérents à leur personne.

Les licenciements qui sont étalés dans le temps mais dictés par les mêmes motifs sont additionnés.

Il existe toutefois une réserve à l’imposition d’un plan social. Ce dernier ne doit pas mettre en danger l’existence de l’entreprise. Il en découle que la condition sine qua non permettant d’invoquer un plan social est que l’employeur dispose de ressources financières suffisantes pour prévoir et appliquer des mesures en faveur des travailleurs.

Dès lors qu’il en a l’obligation, l'employeur négocie:

  • avec les associations de travailleurs liées par une convention collective de travail s'il est partie à cette convention
  • avec la représentation des travailleurs
  • directement avec les travailleurs, à défaut de représentation des travailleurs.

Les associations de travailleurs, les représentants des travailleurs ou les travailleurs peuvent se faire assister par des experts lors des négociations. Ces derniers sont tenus de garder le secret envers les personnes étrangères à l'entreprise.

Les parties ont le devoir de négocier sérieusement et de bonne foi. L’employeur devra être disponible et fournir les informations pertinentes et utiles à l’établissement d’un plan social.

Si le plan social est conclu entre un employeur ou une association patronale et une association de travailleurs, sa nature juridique sera celle d’une convention collective de travail. S’il est conclu avec une représentation des travailleurs en application de la Loi fédérale sur l’information et la consultation des travailleurs dans les entreprises, le plan social constitue un engagement bilatéral obligatoire. Il en va de même si le plan est directement conclu avec les travailleurs eux-mêmes ou avec une délégation librement élue des travailleurs en application de la Loi fédérale sur le travail. Dans ces deux derniers cas, cet accord peut être apparenté à un règlement d’entreprise qui s’intègrera dans chaque contrat individuel de travail.

Lorsque le plan social émane d’une décision unilatérale de l’employeur, les prestations qu’il contient feront partie intégrante du contrat de travail des employés qu’ils les ont acceptées. Il faut retenir que le plan social déploie un effet normatif dont les travailleurs peuvent directement faire valoir des prestations contre l’employeur.

Un plan social peut concerner tous les travailleurs licenciés ou une partie d’entre eux seulement. Dans ce dernier cas, il faudra respecter le principe de l’égalité de traitement en fondant la différence de traitement sur des critères objectifs et justifiés (niveau de salaire, ancienneté, situation familiale, proche de l’âge de la retraite, etc.).

Si les parties ne parviennent pas à s’accorder ou si l’une d’entre elle n’entre pas en négociation, il est possible de saisir le tribunal arbitral qui arrêtera un plan social (art. 335j CO). La sentence arbitrale a autorité de chose jugée et un effet normatif auprès de tous les travailleurs touchés par le licenciement collectif.

La saisine d’un tribunal arbitral a un coût et l’assistance judicaire n’existe pas dans les procédures d’arbitrage. Les frais se répartissent selon la convention d’arbitrage. Si l’employeur est lié par une convention collective de travail qui institue un organe d’arbitrage, les parties prennent en charge les frais et les dépens selon ce qui est prévu par la CCT. Les parties ont également la possibilité de soumettre leur litige à l’office fédéral de la conciliation ou à un office cantonal de conciliation qui agissent en principe gratuitement.

Si un licenciement est notifié sans respecter l’obligation de négocier un plan social, il est abusif au sens de l’article 336 al. 2 let. c CO. Cela couvre les cas où le personnel a été licencié sans ouverture de négociation, ou lorsque les négociations n’ont pas été menées sérieusement ou de bonne foi. A noter que cette sanction s’applique indépendamment de la conclusion d’un plan social ultérieur.

Il est également important de relever que les dispositions relatives au plan social ne s'appliquent pas en cas de licenciement collectif effectué pendant une procédure de faillite ou une procédure concordataire qui aboutirait à la conclusion d'un concordat. L’exclusion devrait également s’appliquer en cas d’ajournement de faillite.

Le contenu du plan social est laissé à la libre volonté des parties. Il peut faire l’objet de diverses mesures et peut même concerner des travailleurs qui ne sont pas directement visés par le licenciement collectif. Le plan social est toujours destiné à une pluralité de travailleurs, dès lors il doit être interprété de manière extensive. Les mesures d’un plan social peuvent être réalisées pendant la période de consultation, entre l’annonce du licenciement et la fin des rapports de travail.

Exemple du contenu d’un plan social:

  • mise en place de délai de congé plus court, rallongement du délai de préavis, libération de l’obligation de travailler
  • paiement d’indemnité en fonction de la situation du travailleur (âge, ancienneté, position hiérarchique)
  • soutien au reclassement professionnel, prise de contact avec d’autres entreprises, aide à l’élaboration d’un dossier de candidature (lettre de motivation, curriculum vitae, etc.)
  • prise en charge des frais de formation continue visant la réintégration du travailleur dans la vie active
  • compensation du salaire en cas de nouvel emploi moins bien rémunéré ou de chômage pendant une certaine durée
  • encouragement aux départs volontaires avec indemnités
  • priorité au réengagement dans une autre entreprise du groupe
  • paiement de «rentes de ponts» jusqu’à ce que le travailleur atteigne l’âge de la retraite
  • prise en charge des frais de déplacement pour le travailleur dont la nouvelle activité serait plus éloignée ou mise à disposition d’un logement de service dont le loyer est pris en charge
  • prolongation de la couverture de l’assurance-accident de 180 jours aux frais de l’employeur ou transfert dans l’assurance individuelle perte de gain avec prise en charge des primes (ou d’une partie) par l’employeur.
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